Puma continue à aider Israël à blanchir par le sport ses violations des droits de l’Homme

Des entreprises telles que Puma qui soutiennent les associations sportives israéliennes ignorent délibérément l’oppression des athlètes palestiniens.

Par Aya Khattab, le 27 octobre 2019

La footballeuse palestinienne Aya Khattab demande à Puma de reconsidérer son contrat avec l’Association de Football Israélien [Avec la permission du mouvement BDS] [Daylife]

Depuis que, petite fille, j’ai commencé à jouer au football, je rêvais d’intégrer l’équipe nationale palestinienne féminine de football. Et j’y suis arrivée ! J’ai gravi les échelons, en commençant avec l’équipe U 16, et je suis maintenant défenseure dans l’équipe nationale.

Mais réaliser mon rêve signifiait non seulement de travailler dur, mais aussi d’affronter encore un autre aspect du régime militaire d’oppression et de discrimination raciale d’Israël.

Etre un athlète en Palestine n’est pas facile. Ici, on ne peut pas dire que le jeu est au-dessus de la politique ou du conflit. Ici, nous sommes cernés par Israël par des barrages routiers, des murs de séparation, des routes réservées et des colonies. L’infrastructure israélienne d’occupation et d’apartheid dénie à tous les Palestiniens, y compris les athlètes, toute liberté de circulation. Nous sommes régulièrement harcelés, menacés et humiliés par les forces israéliennes. Nous ne pouvons pas nous payer le luxe d’oublier l’occupation quand nous sommes sur le terrain.

Nous sommes constamment soumis à des fouilles humiliantes aux checkpoints militaires lorsque nous nous déplaçons pour des sessions d’entraînement ou des événements. Des descentes de soldats en armes interrompent nos matchs et agressent les joueurs. Nos terrains sont avalés par des colonies illégales toujours plus étendues et nos stades détruits par les bombes israéliennes.

Poursuivre une carrière d’athlète en Palestine est en fait un combat permanent, car l’occupation israélienne dresse des obstacles devant nous à chaque étape. C’est pourquoi nous attendons du reste du monde, et spécialement des institutions et des sociétés sportives, qu’il soit conscient de nos souffrances et nous soutienne. C’est pourquoi nous réprouvons les tentatives des marques et des sociétés de sport pour blanchir l’occupation israélienne.

L’année dernière, le fabricant mondial de vêtements de sport Puma a signé un accord de parrainage de quatre ans avec l’Association du Football Israélien (IFA). L’IFA comprend des équipesdes colonies israéliennes illégales construites sur la terre volée à des familles palestiniennes en violation du droit international.

La complicité de l’IFA avec l’entreprise coloniale illégale israélienne a été maintes fois condamnée par des conseillers de l’ONU, des dizaines de responsables élus, des personnages publicset des associations de la société civile et de défense des droits de l’Homme.

Le parrainage de l’IFA par Puma, et la légitimité internationale que cela lui accorde, donne au régime raciste d’extrême droite israélien un signal l’autorisant à continuer en toute impunité son expansion coloniale illégale et l’extradition des familles palestiniennes hors de leurs terres ancestrales.

Pumaditque le sport « a le pouvoir de nous transformer et de nous dynamiser ». C’est vrai. Le sport a changé ma vie et la vie de beaucoup de Palestiniens qui ont persévéré dans la poursuite de leurs rêves malgré tous les aléas d’une occupation.

Mais au lieu de dynamiser des gens comme nous – qui luttons quotidiennement sous oppression – Puma a choisi de dynamiser et de soutenir nos oppresseurs.

Plus de 200 équipes palestiniennes ont appelé la société à rester fidèle à son propre code de déontologieet à mettre fin à l’accord de parrainage avec l’IFA.

Quelle a été la réponse de Puma aux demandes répétées de révision de ce contrat ? Une tentative dérisoire pour détourner les critiquesen prétendant une « dévotion à l’égalité universelle » alors qu’elle continue de souscrire aux violations israéliennes des droits fondamentaux des Palestiniens tout en aidant Israël à blanchir par le sport son régime d’oppression.

Cependant, la Coupe de Palestine de cette année a été annulée à cause des restrictions imposées par Israël à la circulation des Palestiniens. Israël a tout d’abord refusé des permis à tous les joueurs de l’équipe gagnante de la Ligue de Gaza, sauf un qui a été autorisé à aller en Cisjordanie occupée. Quand l’équipe a renouvelé sa demande, Israël a refuséles permis à tous les joueurs sauf cinq.

En 2018, les tirs de snipers israéliens ont tuéà Gaza 183 Palestiniens et en ont blessé plus de 6.000 qui participaient à des manifestations pacifiques pour demander la fin d’un siège destructeur israélien long de 12 ans et la réalisation de leur droit juridique au retour ratifié par l’ONU. Les snipers israéliens ont mis fin aux carrières d’athlètes palestiniens prometteurs, dont un footballer, un cycliste, un boxeur et un joueur de volley-ball.

Une commission d’enquête de l’ONU a découvert que les soldats israéliens avaient intentionnellementciblé et tué des civils palestiniens qui participaient aux manifestations, ce qui peut être considéré comme des crimes de guerre.

Et pourtant, l’attitude de Puma n’a pas changé. C’est pourquoi les gens qui, à travers le monde, soutiennent le mouvement de Boycott, Désinvestissement et Sanctions (BDS) ont mené davantage d’actions contre cette société. Des milliers d’entre eux se sont engagés à cesser d’acheterles produits Puma jusqu’à ce que celle-ci mette fin à son parrainage de l’IFA.

En juin de cette année, des associations de défense des droits de l’Homme de 20 pays dans le monde ont dénoncéson parrainage de l’IFA devant des magasins et des bureaux de Puma et lors de matches avec des équipes sponsorisées par Puma. Aujourd’hui, elles vont revenir pour une deuxième journée mondiale d’action, avec plus de 50 actions dans le monde.

C’est à nous tous de faire rendre compte à Puma pour ne pas avoir maintenu les principes du sport et du fair play.

En tant que jeune femme palestinienne déterminée qui a repoussé les frontières et surmonté les obstacles une bonne partie de sa vie, je ne permettrai pas que le régime d’oppression d’Israël m’empêche de vivre mon rêve.

Tous ceux qui tiennent à la liberté et à la justice peuvent me rejoindre en exhortant Puma à revenir au niveau de ses promesses de conduite d’un changement social en mettant fin à son parrainage de notre oppression.

Aya Khattab

Aya Khattab est défenseure dans l’équipe nationale palestinienne de football féminin.

Traduction : J. Ch. pour l’Agence Média Palestine

Source : Al Jazeera

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